vendredi 9 juin 2017

H comme Héritage

Le testament est avec le contrat de mariage un des actes notariés qui nous apprend beaucoup sur la transmission du patrimoine ainsi que sur les relations entre les générations. Ces contrats ont ainsi plus qu’une simple valeur juridique puisque grâce à eux, nous apprenons beaucoup sur le mode de fonctionnement de la famille.

Arrêtons-nous sur le testament de Charles Cavet, dont j’ai déjà parlé.

On a vu qu’il avait eu trois enfants de ses deux unions. Nous les retrouvons dans le testament du marchand drapier de Bourdeaux, qui, curieusement, a été rédigé à Crupies, dans la maison d’un laboureur, François Augier.



Le testament fut néanmoins passé devant le notaire de Bourdeaux, Maître Brun Larochette le 5 octobre 1760 (2 E 17178). Charles est alors âgé de 53 ans. Nous pouvons nous demander pourquoi rédiger un testament à ce moment. Le notaire ne précise pas l’état de santé de testateur, ce qui est rare, mais nous pouvons penser que Charles n’était pas malade, ou tout du moins pas au point de passer de vie à trépas. Son fils aîné, Jean Charles, s’est marié l’année précédente, ses autres fils sont encore célibataires. C’est donc sûrement pour assurer la transmission de son patrimoine à ses deux autres fils qu’il fait appel au notaire. Il est fort possible également qu’il ait fait son testament pour avantager un de ses enfants. C’est effectivement le cas.

Charles commence par décrire ce qu’il donne à son premier fils : cela se résume en une phrase.

Savoir donne et lègue le dit sieur Cavet testateur à Jean Charles Cavet son fils aîné et de feue Isabeau Dupuy sa première femme, la somme de cinq sols outre ce qu’il lui a déjà donné dans son contrat de mariage avec Marianne Gras sa femme, l’instituant en ce jour son héritier particulier.

Jean Charles reçut mille livres dans ce contrat de mariage (Contrat du 27 janvier 1759, AD Drôme, 2 E 11696, Maître Combe). Il faut voir ici une sorte de dénigrement de son fils aîné. En effet, Charles ne le nomme que son héritier particulier et non universel. On ne peut cependant pas parler de déshéritement dans la mesure où Charles a participé à la communauté de Jean Charles. Mais il est transparent que les relations entre le père et le fils n’aient pas été au beau fixe, d’où le legs, ridicule, de cinq sols seulement.

Ensuite le testateur s’intéresse à Louis Aimé, et lui lègue la même somme de mille livres pour sa légitime paternité et autres droits quelconques. Le dernier fils de Charles n’est pas encore marié et il lui assure ainsi une dot considérable, faisant de lui son héritier particulier.

C’est donc à son autre fils que Charles garantie l’avenir. Il veut que son héritage appartienne à Jacques Aimé, l’instituant son héritier universel. Le premier fils du testateur et de Madeleine d’Hauteville reçoit de la sorte tous ses biens, meubles, immeubles, nom, raison, droits et actions, présents et avenirs.

Ce testament est très court. C’est en effet le moins long que nous ayons trouvé dans nos archives concernant la famille Cavet, peut-être en raison de la simplicité des dernières volontés du testateur.

Charles Cavet mourut le 30 mars 1773 à Bourdeaux, hors l’Eglise, quelques mois après Madeleine d’Hauteville, décédée le 20 mars de la même année, également hors l’Eglise.


Testament de Charles Cavet

Aujourd’hui, cinquième octobre année mil sept cent soixante, après midi, par devant le notaire du Roi à Bourdeaux sous signé et les témoins bas nommés, établi sieur Charles Cavet, drapier habitant au dit lieu de Bourdeaux. Lequel nous a déclaré vouloir faire son testament nuncupatif et en a dicté le contenu en la présence des témoins et nous l’avons dirigé ainsi que suit. Savoir donne et lègue le dit sieur Cavet testateur à Jean Charles Cavet son fils aîné et de feue Isabeau Dupuy sa première femme, la somme de cinq sols outre ce qu’il lui a déjà donné dans son contrat de mariage avec Marianne Gras sa femme, l’instituant en ce jour son héritier particulier. Plus donne et lègue à Louis Aimé Cavet son autre fils légitime et de Madeleine d’Hauteville sa seconde femme, la somme de mille livres pour sa légitime paternité et autres droits quelconques qui peuvent lui compter sur ses biens, parts d’augment et joyaux payables lorsqu’il pourra valablement acquitter, l’instituant en ce jour son héritier particulier. Et sur tous ses biens, meubles, immeubles, nom, raison, droits et actions, présents et avenirs, le dit sieur Cavet testateur a fait, nommé et institué pour son héritier universel, Jacques Aimé Cavet son autre fils et de la dite d’Hauteville sa femme auquel il veut que son héritage appartiennent à la charge de ses dons et légats. C’est, du dit Cavet testateur, son dernier testament nuncupatif et ordonnance de dernière volonté nuncupative dont il nous a dicté et déclaré mot à mot le contenu en la présence des témoins et nous l’avons de même rédigé et tout de suite fait lecture mot à mot au dit sieur Cavet et dans tout son entier en présence des témoins. A déclaré y persister en requérant acte. Fait et publié au terroir de Crupies, maison de sieur François Augier aux présences de sieur André Augier laboureur habitant au dit lieu de Crupies, et de sieur Claude Brachet aussi laboureur habitant au lieu de Comps, témoins requis et signés avec le testateur.

Source : AD Drôme, 2 E 17178, folio 43, Maître Brun Larochette.

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