lundi 26 juin 2017

V comme Vernet, ou l’implantation à Dieulefit

C’est par les mariages que les Cavet prennent leurs marques à Dieulefit.

D’abord Jacques, fils de Jacques et Diane Brachet, épouse en 1719 Anne Morin, fille de Pierre et de Judith Delloule. Puis en 1730, Charles Cavet, fils d’Aimé et d’Anne Garnier, se marie avec Isabeau Dupuy, fille de Jean et de Madeleine Jean-Laplace.


Mais c’est vraiment avec les mariages de Jean Charles, fils des précédents, avec Marianne Gras, puis avec Marguerite Vernet, que l’installation des Cavet à Dieulefit est durable.

Quelles sont les raisons qui ont pu pousser Jean Charles à s’établir à Dieulefit ? A travers mes recherches, j’ai essayé de le deviner. 

D’abord sa filiation. Jean Charles est le fils de Charles et d’Isabeau Dupuy, une fille de Dieulefit, dont la famille, originaire de Die, sont venus à Dieulefit vers le milieu du XVIIème siècle où ils sont chirurgiens. L’influence du réseau familial maternel de Jean Charles le pousse sans doute à passer du temps à Dieulefit.

Il est également possible qu’il ait eu des relations professionnelles avec des drapiers de ce village. Les contacts entre Bourdeaux et Dieulefit sont évidemment marchands, à cause du négoce des tissus.

Une autre raison possible est le procès qui opposa Jean Charles Cavet à Marc Cordeil, jeune homme de Mornans. Le procès aurait débuté suite


            au tirage pour la milice du mois mars 1751, le sort étant échu a nommé Marc Cordeil, il sollicita la jeunesse de faire une collecte en cachette et à l’insu des officiers de la compagnie ce qui ayant été exécuté, on ramasse une somme de cent soixante livres qui fut remise audit Cordeil.


Marc Cordeil remit cet argent à Jean Chirol et Jean Charles Cavet, mais, voulant le récupérer, il se heurta à un refus. Ce procès dura au moins cinq ans, puisque les premiers écrits de cette liasse commencent en juin 1752, et les derniers que nous trouvons sont du 8 mars 1757. Nul doute, cette affaire fit grand bruit à Bourdeaux, et devait ternir la réputation de la famille Cavet. On peut imaginer une forme de bannissement de la part de la famille et de la communauté, ce qui expliquerait le départ de Jean Charles pour Dieulefit. On peut aussi imaginer que les rapports entre Charles Cavet et son fils aîné ne devaient pas être au beau fixe, ce qui le poussa, très probablement, à ne pas l’instituer son héritier universel.
Ce qui est sûr, c’est que c’est à Dieulefit qu’il fait la connaissance de sa femme, Marianne Gras. Il y a deux alliances pour ce couple.
Mariage au Désert le 2 mars 1757, devant le Pasteur Rozan, le procès contre Marc Cordeil n’est même pas terminé. Dans cet acte, Jean Charles est toujours domicilié à Bourdeaux, de même que le 8 mars 1757.
Le 9 septembre 1757, dans un acte d’achat de terres, Jean Charles habite Dieulefit. Il nous est ainsi possible de dater l’installation de Jean Charles dans ce village : entre mars et septembre 1757.
Contrat de mariage le 27 janvier 1759, devant Maître Combe. Et la bénédiction à l’église de Dieulefit eut lieu un mois plus tard, le 26 février. Il s’est donc écoulé presque deux ans entre les deux mariages, le protestant et le catholique, très certainement en raison du procès dont nous avons parlé.

L’alliance avec Marianne Gras fait entrer Jean Charles de plein pied dans le village. Les parents de la mariée lui font don d’une vigne située au quartier de la Fontête, qui se trouve au Nord du village, sur la route de Bourdeaux. Les Gras sont de riches propriétaires, ils donnent également à leur fille une maison située dans la rue du bourg, composée de plusieurs pièces. Le contrat fait également mention du trousseau de Marianne évalué à la somme de trois cents cinquante livres et qui se compose ainsi que suit :


            Deux lits complets, une cave à bouillir vendanges, trois tonneaux, ensemble les coffres, garde-robe, cuivrerie, étain en vaisselle et autres meubles et effets mobiliers qui se trouvent actuellement dans ladite maison ci dessus constituée, ensemble six draps de lit, deux grandes nappes, cinq autres nappes et douze serviettes.


Marianne Gras donne la même année à Jean Charles Cavet une fille : Marianne Cavet, née le 27 septembre 1759. Mais trois mois plus tard, elle décède, le 27 décembre, âgée de vingt-sept ans. Marianne Gras avait rédigé un testament cinq jours avant devant Maître Combe dans lequel elle donnait trois livres à son père et deux cent cinquante livres à Jean Charles Cavet son bien aimé mari. Le notaire précise que la testatrice est très malade, elle n’eut pas dû se remettre de l’accouchement, comme c’était souvent le cas sous l’Ancien Régime.
Jean Charles se remarie à Dieulefit le 31 août 1761 devant le Pasteur Rozan avec Marguerite Vernet, issue d’une grande famille de foulonniers protestants, influente dans la communauté dieulefitoise. La grand-mère maternelle de Marguerite était, par ailleurs, Françoise Noyer, une petite-fille de David Noyer, le châtelain de Comps et Orcinas dont on a déjà parlé. Le contrat de mariage est signé le 7 juin 1761, devant Maître Combe, et là aussi le père de l’épouse dote sa fille en biens fonciers. Il lui lègue en premier lieu une pièce en terre labourable au quartier de Massebœuf, quartier tout proche de la Fontête, au Nord du village, ainsi qu’une pièce de terre et hermes au quartier des Hubacs, situés à l’Ouest de Dieulefit, sur le chemin allant au Poët Laval.

C’est dans ce quartier que Jean Charles s’était installé. Et c’est logiquement en voisin qu’il a déniché sa deuxième épouse.


Le 9 septembre 1757 correspond à deux événements majeurs : c’est à cette date que Jean Charles est dit pour la première fois habitant à Dieulefit, et c’est également à ce moment qu’il achète une terre aux Hubacs. Louis Arnaud, drapier de Dieulefit, lui vend effectivement une pièce de terre en hermes et vieilles vignes d’une contenance de deux sétérées et demie (1 sétérée = 25 ares environ). Des terres agrandies le 6 février 1765, quand Jean Charles achète à Mathieu Raspail, dit Fatier, ménager, trois sétérées et demie en terre, vigne et verger de châtaigniers aux Hubacs.

Il se trouve en 1765 à la tête de trente quartallées aux Hubacs, soit 187,5 ares, et six quartallées, soit 37,5 ares à Massebœuf. Au total, Jean Charles possède trente-six quartallées ou deux cent vingt-cinq ares à Dieulefit, auquel il convient de rajouter la maison rue du bourg et la vigne à Fontête issue du contrat de mariage avec Marianne Gras.

Je n’ai pas encore réussi à savoir ce que sont devenues les terres de Massebœuf et de Fontête. Par contre, les terres des Hubacs sont encore la propriété des descendants de Jean Louis Cavet (1766-1831), le fils de Jean Charles et Marguerite Vernet.

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