Dimanche 22 septembre 1895, une journée ensoleillée, propice à la
promenade. Fatale.
Aline vient tout juste d'avoir 16 ans. Comme toutes les jeunes
filles de son âge, elle aide ses parents au travail de la terre, et les
accompagne une fois par mois au marché pour vendre les dernières récoltes de
l'été. Mais au moment de rentrer à la maison, cette fois-là, elle préfère
rester au village.
Partez devant, je serai de retour à Félines avant la tombée de la
nuit, c'est promis.
Elle doit avoir un coquin en tête. Manquerait plus qu'il nous
l'enlève, avaient dû se dire Jean et Suzanne qui marchaient en direction de la
ferme familiale, avec leurs autres enfants. Aline espère en réalité revoir le
fils du cordonnier. Elle sait qu'elle lui a tapé dans l'oeil. Au bal des
pompiers le mois dernier, Marcel l'a faite danser, et beaucoup rougir.
Mais point de Marcel aujourd'hui. Il est parti faire son service
militaire. Aline est triste. Elle allait devoir l'attendre pendant quelques
mois... voire des années. Elle prend donc le chemin du retour. A pied.
Pensive, l'adolescente amoureuse papillonne donc le long de la
route entre Dieulefit et Bourdeaux. Elle marche d'un bon pas, tout en imaginant
le quotidien de son Marcel. Il faut dire que ça grimpe ! Et quand on arrive
chez Cordeil, le chemin est encore plus dur à gravir. Mais Aline n'a pas peur,
elle connait la route depuis toujours. Combien de fois a-t-elle été voir ses
cousins à Dieulefit ?
Régulièrement, elle croise marchands et voituriers qui lui
proposent de la raccompagner. Elle refuse poliment, préférant marcher. Funeste
erreur.
En début d'après-midi, elle tourne enfin au col du Pertuis. Il
fait encore bien chaud et la jeune fille décide de faire une pause, le long de
la route de Truinas. Sous un hêtre. Elle sort un cahier d'école. Commence à dessiner. Ecrit
l'initiale de son promis. M. Rajoute la sienne. Un A.
Soudain, elle entend la voix d'un homme. Un peu plus âgé que
Marcel. Et son dessein n'est pas des plus bienveillants. Le rustre soulève son
jupon. Mais Aline ne se laisse pas faire, elle se débat. Une lutte s'engage
alors, l'homme sort un couteau. Il est rapide et plante sa lame dans sa cuisse.
La jeune fille hurle de douleur et l'homme lui tranche la gorge. Elle ne crie
plus.
Aline Alaise est la sixième victime de Joseph Vacher, le tueur de
bergers, surnommé également le Jack l'Eventreur du Sud-Est.
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